Den Paolig, un singulier destin

Si depuis les années 1835 le petit port de pêche de Douarnenez, sort de la torpeur hivernale aux sons des fanfares et des chants de marins, il est une fête populaire qui puise ses racines dans un univers fait de labeur, de souffrances, de frustrations et d’interdits.
De ce grand élan libérateur, à l’aube du printemps, naît alors la tradition du carnaval que l’on retrouve dans beaucoup de pays du monde.
Ici, à Douarn, l’heure est venue de « faire les Gras ».

En pareilles circonstances rien ne vaut un bon bouc émissaire pour exorciser le mal de l’hiver.
A Venise il s’appelle  » Arlequin ou Polichinelle « , à Nice «  Le Roi « , à Dunkerque «  Jean Minne  » … A Douarnenez, on l’appelle « Den Paolig ». Qualificatif d’une personnalité locale que certains traduiraient du breton au français par « pauvre homme », mais que la pudeur populaire invite à traduire par « homme pauvre », terme plus respectueux des conditions modestes dans lesquelles vivaient jadis les populations locales.

Le Den Paolig 2024. Hissé au fronton des hall, restera accroché durant toute la fête.

En effet, durant les mois d’hiver, à la météo capricieuse, le travail se faisait rare. Les tempêtes nombreuses ne permettaient pas aux pêcheurs de travailler, aux usines de conserves de produire.
Il en résultait alors de grandes privations alimentaires et pour la population, une extrême pauvreté.
A la sortie de l’hiver, alors que la pêche pouvait commencer à reprendre et qu’une vie meilleure s’annonçait, le calendrier religieux n’allait par tarder à sonner l’heure du Carême, imposant par sa loi divine, jeûne et abstinence des plaisirs.
Alors, en réaction à ces nouveaux interdits, avant que la quarantaine imposée ne frappe les esprits, faisons la fête ! Dira le peuple.

Le rituel annuel des Gras commencera par une cérémonie d’intronisation du Den Paolig, sous le regard bienveillant des membres de la confrérie, nominés lors des années précédentes.
C’est alors que la fête pourra commencer jusqu’au fameux mardi des Gras, veille du mercredi des Cendres, date de fin des festivités qui mènera Den Paolig sur le bûcher.

Les Den Paolig des années précédentes réunis dans leur Confrérie.

De cette aventure populaire, l’Association Brestoise « Moulin à Images », a eu la curiosité de pousser les portes des préparatifs de la fête.
Ce reportage, diffusé sur la chaîne TV Tébéo, dans le magazine Chemins de Traverse, retrace l’envers du décor.

Les Gras 2024 vus par « Moulin à Images » de Brest

Si la ville de Douarnenez, cité de pêcheurs, de marins, de baroudeurs des mers, d’artistes en tous genres a su faire perdurer cette tradition populaire, il est une autre cité maritime du Finistère, au passé prestigieux qui, dans un tout autre registre, a un temps célébré un autre personnage aussi mystérieux que celui de Den Paolig. Il s’appelait Angiboust, mais c’est une autre histoire que je vous révèlerai peut-être, un jour, dans un autre billet …

Toujours debout

Des guerres des tranchées,si loin de l’océan
Aux campagnes du Cap, dévastées par Ciaran
Un breton reste debout, jamais ne se rend.

Les nuits de la lectures, organisées par le Centre national du livre du 18 au 21 janvier 2024, sur le thème du « Corps », nous offrent l’occasion de découvrir des textes et des poèmes évoquant la grand capacité de résilience, de l’homme et de la nature.

Résistant à la tempête de novembre 2023, autant qu’à la folie meurtrière de la seconde guerre mondiale qui ravagea ses branches, cet arbre centenaire, fragile sur son tronc, reste toujours debout malgré les affres du temps.
Telle une sculpture, érigée à la souffrance du monde, il est le témoin silencieux des détresses du temps. C’est avec plaisir que je l’ai retrouvé lors d’une dernière promenade.
Certes plus décharné que jadis, il m’avait alors inspiré quelques lignes, dédiées aux mutilés de la grande guerre.
Pour en savoir plus sur cet arbre mythique cliquer sur ce lien : « Les Gueules cassées de 17 ».