Le masque et la plume

Alors que le sinistre voile obscur d’une pandémie se dépose à pas feutrés sur le monde, éloignant pour un temps nos rêves de voyage et de visites de musées, la plume de l’écrivain et le pinceau de l’artiste brisent parfois le silence de nos esprits engourdis.

Le masque faisant désormais partie de notre code vestimentaire, je me replonge dans des lectures aux parfums exotiques, le regard mystérieux de quelques photos retrouvées, un souvenir de voyage en Inde et la peinture d’un ami artiste, épris de liberté.

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Un monde sans sourire est un monde sans lumière.

 

 

Inde (8)- Rencontres insolites

Dans ce type de voyage, où tout est parfaitement organisé, orchestré, les initiatives personnelles sont souvent très réduites. A cela s’ajoute la barrière de la langue, ce qui, à l’évidence, restreint les échanges approfondis avec la population.
Or, ce que personnellement j’apprécie dans un voyage, en dehors de la découverte de lieux majeurs parfaitement nécessaire à la compréhension de l’histoire du pays et de la société visitée, c’est la rencontre avec l’imprévu, celle que l’on n’a pas le temps de préparer et qui laisse la spontanéité s’exprimer.
Parfois la prise de vue photographique se résume à de simples échanges de regards, tantôt complices, tantôt interrogateurs, mystérieux, voire réprobateurs.
C’est le début de la rencontre, point souvent de départ au dialogue, comme ici à Bikaner en marge du marché.
Bikaner-(9)Pushkar-(10)Derrière ces voiles, colorés et lumineux, toujours une intention évidente de grande curiosité réciproque. Un peu plus tard, en voyant cette fillette dans un numéro d’équilibriste , je ne peux m’empêcher de penser au superbe poème de Jacques Prévert  « Etranges étrangers », dont voici un extrait :

Marché-chameaux-Pushkar-(16)
Enfants indochinois
jongleurs aux innocents couteaux
qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
de jolis dragons d’or faits de papier plié
Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
qui dormez aujourd’hui de retour au pays
le visage dans la terre

Marché-chameaux-Pushkar-(24)

La photographie est souvent un bon outil pour entrer en contact, comme ici à Pushkar, silencieux face à face, à travers la vitre du car dans un furtif échange de bons procédés, un « prêté pour un rendu », à moins qu’il ne s’agisse de « l’arroseur arrosé ».

 

Nos regards seront souvent attirés par des scènes insolites, surréalistes, comme ici, au niveau d’un chantier de terrassement lorsque mon objectif croisera ces deux attitudes qui m’interrogeront. Vers quelle évolution se dirige la société indienne ? D’un coté l’insouciance apparente d’une jeunesse dorée, d’un autre la dure réalité du quotidien féminin.
Rte-Puhkar-Jaipur-(13)Rte-Puhkar-Jaipur-(14)Il semblerait aussi que la période « lunaire » de notre voyage corresponde à celle des mariages. La relation cérémoniale homme-femme à travers les rites du mariage m’interroge également par le faste des costumes bien sûr, mais aussi par la mise en scène de cérémonies très éloignées de nos pratiques « celtes ». Une fois encore, il me manquera quelques codes pour tout comprendre. Les liens du mariages sont ici matérialisés par un ruban que le marié tient dans sa main droite et qu’il passe par dessus son épaule pour aller se nouer au voile de la mariée. Encore une très grande dépendance.
Mariage- (3) Mariage-Jaipur (2)
Mariage(6)

Toutefois la jeunesse semble en attente d’émancipation …

Rte-Agra-(2)

Les rencontres se font de façon plus imprévue, au contour d’un chemin …

Fatehpur Siki (1)

Ou simplement sur l’esplanade d’un site touristique, mais toujours avec complicité …

Parfois même l’exercice tourne au casting …

Fort-D'Amber-(52)  Fort-D'Amber-J561)
Minaret-Qutub-Minar-(29) Minaret-Qutub-Minar-(27)

Et il y en aura pour tous les goûts, pour toutes les couleurs …
(Extrait d’une carte postale qui, semblerait-il, n’est jamais arrivée à son destinataire …)
Carte-PostalePushkar-(24)   Pushkar-(43)

Jaipur-rue-(7)  Delhi-(13)

 Mais l’insolite c’est aussi …
Tout ce qui touche à l’animal est culte.
Chez nous, en dehors des périodes estivales, lorsque les cirques et autres ménageries arpentent les chemins de nos campagnes, nous ne sommes jamais confrontés à une circulation animale aussi intense. Arrêt sur image, car ici l’animal est roi.

Rte-Delhi-(11)Rte-Puhkar-Jaipur-(21) Prise de têtes sacrées …
Tete-a-tête sacréAu final c’est toujours lui le Roi.

Jaipur-rue-(12)Et à bientôt pour un prochain billet …

Inde (7)- de Bikaner à Pushkar

Reprenons notre petit cheminement, laissé en suspend pour fêter l’année nouvelle.

Nous quittons la région désertique du Thar pour la direction de Jodhpur.
La route est toujours aussi animée et encombrée de véhicules plus hétéroclites et bariolés les uns que les autres.
Rte-Bikaner-Jodhpur-34_thumb.jpg

Voiture-2.jpg Voiture-132.jpg

De longues colonnes de personnes se déplacent à pied, comme sur les chemins d’un exil protecteur. Nous nous interrogeons sur les hypothétiques directions qu’elles prennent, la région étant apparemment déserte de toute activité visible.

Rte-Bikaner-Jodhpur-16_thumb.jpg

D’après notre guide, le cycle lunaire serait responsable de cette migration, les cortèges seraient animés par quelques rendez-vous mystiques.

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Nous ne tarderons pas en effet à voir sur le chemin de denses rassemblements autour de temples éphémères, où les offrandes s’ajoutent aux éléments naturels du décor, comme sous nos latitudes les guirlandes sur les sapins, à l’époque de Noël.
A chacun ses codes.

En chemin nous ferons plusieurs haltes comme ici au mausolée Jaswant-Thada, somptueux édifice de marbre blanc, qui préfigure les architectures que nous retrouverons dans les prochains jours en visitant le Taj Mahal.

Mausolee-Jaswant-Thada-8_thumb.jpg

La région aride est une région vallonnée d’où sont extraits les grès rouges et ocres qui ont servis jadis aux constructions des palais que nous visiterons. Un vrai plaisir pour l’œil des photographes, malgré les voiles atmosphériques souvent signes de pollution.

Mausolee-Jaswant-Thada-1_thumb.jpg

 A quelques encablures, plus haut sur la colline, dominant la vallée et la ville de Jodhpur, la ville bleue, le magnifique Fort de Mehrangarh et ses impressionnantes fortifications, toujours propriété de l’actuel maharadja de Jodhpur.

Jodhpur-Bleu-310_thumb.jpg

Fort-Mehrangarh-(7)  Porte-Village-(15)
Jodhpur appelée ville bleue en raison des couleurs des façades d’habitations. Plusieurs explications nous sont données, identification culturelle, pour éloigner les moustiques, chacun se forgera sa propre légende.

Jodhpur-Bleu-1_thumb.jpg

Notre arrivée dans la région de Pushkar marquera un tournant dans l’ambiance du voyage. Petite ville en lisière du désert, Pushkar est un lieu de pèlerinage pour les Hindous. Pas étonnant donc que les couleurs locales prennent ici une saveur nouvelle. Nous sommes fin novembre et c’est la fin du marché au bétail avec sa célèbre foire aux chameaux. Le dépaysement est assuré. Rte-Pushkar-Jaipur(33)Femmes(8)Les foires sont toujours des lieux d’échanges, de rassemblements, de fêtes. Ici les couleurs sont toujours présentes malgré le voile d’un brouillard matinal et le résultat catastrophique d’une pollution visible, autant terrestre, qu’atmosphérique.Marché-chameaux-Pushkar-(18)  Rte-Bikaner-Jodhpur-(24)
Rte-Pushkar(31) Marché-chameaux-Pushkar-(11)
Préfigurant les ambiances des temples hindous, en bord de rivières ou de fleuves,  les palais et les nombreux ghâts sont envahis de pèlerins en recherche de dévotions.

Pushkar-16_thumb.jpg

Rte-Bikaner-Jodhpur-50_thumb.jpg

Terre Hindoue certes, mais lieu de commerce, de pèlerinage pour tous ceux dont l’identité mystique se dévoile au grand jour. Passage obligé sur l’ancienne route de la soie , Pushkar apparait comme l’avant poste pour les brahmanes de Katmandou et autres personnages occidentaux épris de liberté, provenant du monde entier et que les années 1970 ont attirés sur ces terres, au destin si particulier.

A très bientôt, si vous le voulez bien, pour une nouvelle page, dédiée cette fois à quelques rencontres insolites …